C’est une lettre usée, abîmée, que l’on devine avoir été recopiée par la main d’une femme pour qui l’écriture est encore un animal indompté et étrange, qui parvient à vous trouver.
On sent dans le tracé de ces lettres, toute la maladresse de l’épistolaire, mais aussi tout son empressement, et son inquiétude. Les mots sont nerveux, tracés au plus vite, et sans doutes celle qui écrivait cela n’espère pas de réponse. Et prie pour en avoir, pourtant.
« A mes sœurs Kaldorei, aux Sentinelles qui parcourent Azeroth, à toute notre sagesse éternelle, je vous appelle au secours.
Je suis Eôwyn Silimaurë, chasseresse de Teldrassil. Je ne suis personne, rien qui ne compte, mais je poursuis un but qui me dépasse, et je ne pourrai jamais y arriver seule.
Quelque part, entre les Royaumes de l’Est et Kalimdor, marche une femme. Une adolescente, qui se nomme Nausicaâ, et que les gens appellent Loredala. Elle est à demi-elfe, une demi Quel’Dorei, ce qui ne se voit que pour des gens avertis, dans ses yeux couleur rubis, et ses cheveux platine. Elle emmène partout avec elle une immense épée, cachée sous des linges, qu’elle porte accrochée à son sac. Elle serait sans doutes bien incapable de la manier, on me l’a décrit frêle et faible.
Cette épée s’appelle l’Epée d’Ishara, et Ishara fut une prêtresse d’Elune, traîtresse aux Kaldoreis, en aimant deux hauts elfes dans sa vie, et en ayant des enfants du second. Cette épée, héritée de son premier amant, Kerinos des Thel’Darsyl, est une engeance démoniaque, une horreur sur terre. Elle vole les vies et les âmes. Depuis dix mille ans, les descendants de la prêtresse traîtresse portent l’arme, depuis dix mille ans elle est nourrie par leurs victimes, dix mille années à faucher les âmes.
J’ai appris que par le lien qui unit les descendants d’Ishara à l’épée, leur sang peut libérer toute ce que l’arme a dévoré, en une puissance que des hommes avertis pourraient contenir, voué au seul et unique Mal. Il suffirait pour cela qu’un érudit ayant connaissances des Mots et des Signes sacrifie la porteuse de l’arme à son épée.
Et la porteuse est là, quelque part, elle voyage, je la sais protégée par d’autres Kaldoreis, dont une certains Duvnarel, et un médecin, Teiana. Ils ne savent pas quel danger cette personne fait courir au monde, quels risques ils prennent à la protéger. Car le seul moyen de délivrer le monde de cette menace, c’est de la détruire. Et il n’y a qu’un moyen de le faire : répandre le sang de la lignée, laisser la terre l’avaler. Alors l’arme ne sera plus rien, sans le sang d’Ishara pour l’appeler.
Depuis des années, je la cherche, depuis des mois, je suis sur sa piste, depuis des semaines, je sais enfin qui elle est, et où elle a vécue, et qui l’a aidé. Mais je suis seule, et on me prend pour folle dans mon entreprise qui consiste à ôter la vie à une enfant. Mais je sais aussi quel danger elle représente, pour Azeroth entière, pour tous les êtres libres. Il n’y a pas d’autres solutions.
Et j’ai besoin d’aide. »